Le cancer, longtemps considéré principalement comme une maladie génétique, est de plus en plus reconnu comme une réponse épigénétique complexe au stress chronique, impliquant des perturbations profondes du métabolisme cellulaire et de l’équilibre redox. Cette perspective ouvre de nouvelles voies pour comprendre et potentiellement traiter cette maladie, y compris l’utilisation de thérapies innovantes comme l’anolyte.
Le métabolisme énergétique des cellules cancéreuses
L’effet Warburg et la glycolyse aérobie
Une caractéristique fondamentale des cellules cancéreuses est leur dépendance à la glycolyse pour la production d’énergie, même en présence d’oxygène. Ce phénomène, connu sous le nom d’effet Warburg ou glycolyse aérobie, contraste avec le métabolisme des cellules normales qui privilégient la phosphorylation oxydative mitochondriale en présence d’oxygène.
Ce processus est beaucoup plus efficace pour produire de l’ATP que la glycolyse, produisant environ 30-32 molécules d’ATP par molécule de glucose, contre seulement 2 pour la glycolyse. Dans le contexte du cancer, les cellules tumorales ont tendance à moins utiliser ce processus, préférant la glycolyse même en présence d’oxygène (effet Warburg), ce qui est moins efficace mais semble offrir d’autres avantages pour la croissance tumorale.
Implications de l’effet Warburg
- Production d’énergie inefficace : La glycolyse produit moins d’ATP par molécule de glucose que la phosphorylation oxydative.
- Avantage de croissance : Malgré son inefficacité apparente, ce métabolisme fournit des intermédiaires nécessaires à la biosynthèse rapide, soutenant ainsi la prolifération cellulaire accélérée.
- Acidification du microenvironnement : La production accrue de lactate rend l’environnement tumoral plus acide, favorisant l’invasion tumorale et inhibant le système immunitaire.
Rôle des mitochondries
Les mitochondries, bien que fonctionnelles dans de nombreuses cellules cancéreuses, présentent souvent des altérations. Des mutations dans l’ADN mitochondrial ou dans les gènes nucléaires codant pour des protéines mitochondriales peuvent contribuer à la reprogrammation métabolique observée dans le cancer.
Le cancer comme maladie redox
Équilibre redox et stress oxydatif
Le potentiel redox est une mesure de la tendance d’une substance à gagner ou perdre des électrons. Dans les cellules, ce potentiel est crucial pour de nombreux processus, notamment la production d’énergie. Un équilibre redox approprié est essentiel pour le bon fonctionnement cellulaire.
Dans le cancer, cet équilibre est perturbé, ce qui conduit à un état de stress oxydatif chronique. Cela signifie qu’il y a une surproduction d’espèces réactives de l’oxygène (ROS) par rapport à la capacité de la cellule à les neutraliser. Les ROS jouent plusieurs rôles importants dans le développement et la progression de cette maladie :
1
Activation de voies de signalisation oncogéniques
Les ROS peuvent activer des voies de signalisation qui favorisent la croissance et la survie des cellules cancéreuses, comme les voies PI3K/AKT et MAPK.
2
Modification de l’expression génique
Les ROS peuvent altérer l’expression de certains gènes, notamment en activant des facteurs de transcription sensibles au redox comme NF-κB et HIF-1α, qui peuvent promouvoir la survie des cellules cancéreuses.
3
Augmentation de la sensibilité aux agents mutagènes
Les niveaux élevés de ROS peuvent endommager l’ADN directement et rendre les cellules plus susceptibles aux mutations causées par d’autres agents mutagènes.
4
Compromission des systèmes de surveillance cellulaire
Les ROS peuvent interférer avec les mécanismes de réparation de l’ADN et les points de contrôle du cycle cellulaire, permettant aux cellules endommagées de continuer à se diviser.
5
Promotion de l’instabilité génomique
Les dommages oxydatifs répétés à l’ADN peuvent conduire à une instabilité génomique, un hallmark du cancer qui facilite l’accumulation de mutations supplémentaires.
Paradoxalement, bien que les cellules cancéreuses produisent plus de ROS, elles développent également des mécanismes d’adaptation pour survivre à ce stress oxydatif élevé.
Signalisation cellulaire et cancer
Le cancer implique des perturbations majeures dans les systèmes de signalisation cellulaire qui régulent normalement la croissance, la division et la mort cellulaire. Voies de signalisation altérées :
- Activation constitutive des récepteurs de facteurs de croissance
- Perturbation des boucles de rétroaction négative (ex : RAS, PI3K/PTEN)
- Activation anormale des voies de survie cellulaire
Ces altérations permettent aux cellules cancéreuses de proliférer de manière incontrôlée et de résister aux signaux de mort cellulaire.
Implications pour de nouvelles approches thérapeutiques
Comprendre le cancer comme une maladie métabolique et redox ouvre de nouvelles perspectives thérapeutiques :
Ciblage du métabolisme glycolytique
Des inhibiteurs de la glycolyse pourraient priver les cellules cancéreuses de leur source d’énergie préférée.
Modulation de l’état redox
Des thérapies visant à perturber l’équilibre redox des cellules cancéreuses pourraient les rendre plus vulnérables aux traitements conventionnels.
Restauration de la fonction mitochondriale
Des approches visant à normaliser le métabolisme mitochondrial pourraient inverser certains aspects de la reprogrammation métabolique cancéreuse.
Thérapies basées sur l’anolyte
L’anolyte, avec son potentiel d’oxydoréduction élevé, pourrait jouer un rôle significatif dans la modulation de l’environnement redox des cellules cancéreuses. Voici comment l’anolyte pourrait potentiellement agir :
Modification de l’environnement tumoral
L’anolyte pourrait aider à contrer l’acidification du microenvironnement tumoral, rendant les conditions moins favorables à la croissance cancéreuse.
Perturbation de l’équilibre redox
En introduisant un agent oxydant puissant, l’anolyte pourrait potentiellement surcharger les mécanismes d’adaptation au stress oxydatif des cellules cancéreuses, les rendant plus vulnérables.
Stimulation du système immunitaire
L’anolyte pourrait aider à créer un environnement plus favorable à l’action des cellules immunitaires, renforçant la surveillance immunitaire contre les cellules cancéreuses.
Amélioration de l’oxygénation
En augmentant potentiellement l’oxygénation des tissus, l’anolyte pourrait perturber la dépendance des cellules cancéreuses à la glycolyse aérobie.
Conclusion
La compréhension du cancer comme une maladie métabolique et redox offre de nouvelles perspectives pour le développement de thérapies innovantes. L’approche basée sur l’anolyte, bien que nécessitant davantage de recherches cliniques, s’inscrit dans cette nouvelle vision en ciblant l’environnement métabolique et redox des cellules cancéreuses plutôt que simplement leurs altérations génétiques. Cette approche holistique, combinée aux traitements conventionnels, pourrait ouvrir de nouvelles voies prometteuses dans la lutte contre cette maladie maligne.
Source :
Auteur : Hussein Kaoud
Titre : Thérapie alternative du cancer
Institution : Université du Caire, Département d’hygiène vétérinaire et de pollution de l’environnement, Faculté de médecine vétérinaire
Date de publication : Mai 2016
DOI : 10.13140/RG.2.1.5090.1363
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